Le 8 décembre 20011, l’Armée d’Occupation Israélienne (AOI) a publié un amendement et une extension de validité pour un précédent ordre militaire. Cet amendement autorise la construction du Mur de Ségrégation sur les terrains des villages d’Al Khader et d’Artas et permet l’encerclement de la zone rurale de l’Ouest du gouvernorat de Bethleem.
Carte 1 : l’amendement de l’ordre militaire 29/07/t.
L’amendement modifie la carte des terres confisquées sur ces villages et ordonne la saisie de 16 hectares de terres soit 16 hectares de moins que mentionné dans l’ordre d’origine publié en septembre 2007 (32 hectares). Cependant, à aucun moment ce changement ne prend en considération les intérêts palestiniens malgré les centaines de pétitions déposées à la Cour Suprême israélienne pour protester contre les pertes dramatiques entrainées par la construction du Mur. Voir la photocopie de l’ordre.
Pourquoi étendre la validité de cet ordre ?
Normalement, les ordres militaires israéliens prennent effet dès la date de leur signature. Mais l’ordre 29/07t a été publié en septembre 2007 et n’a pris effet que le 31 décembre 2009, période pendant laquelle il était prévu que le Ministère de la Défense construise et complète le Mur sur la zone ciblée par l’ordre. Cependant, sur le terrain, le Mur n’a pu être construit en raison des dossiers déposés par les propriétaires palestiniens des villages concernés devant la Cour Suprême. En effet, si le mur était construit, il rattacherait la colonie de Gush Etzion à Israël et dans le même temps, huit communautés palestiniennes seront piégées dans une enclave et isolées du centre de Bethleem et des autres communautés. Cela a donc contraint le gouvernement israélien à publier une extension de validité de l’ordre militaire jusqu’au 31 décembre 2011 pour que le Ministère de la Défense puisse reprendre la construction du Mur et l’annexion de Gush Etzion. Mais encore une fois, les recours devant la Cour Suprême ont bloqué les travaux ce qui a conduit le gouvernement à émettre une nouvelle extension de validité jusqu’au 31 décembre 2014.
En outre, les résidents des villages d’Al Khader et d’Artas n’ont reçu l’ordre que le 3 janvier 2012 alors qu’il avait été publié presque un mois plus tôt, le 8 décembre 2011. Cela dans le but de les empêcher de déposer des objections devant la Cour Suprême, la durée maximum pour les déposer étant de sept jours après publication de l’ordre. Ainsi, les résidents des deux villages se sont fait retirer leur droit d’objection aux ordres militaires.
Tableau 1: Détails des terres confisquées dans les villages d’Al Khader et d’Artas selon l’ordre militaire 29/07t (amendement n°2)
|
N°
|
Nom du village
|
Terres confisquées –hectares
|
1
|
Al Khader
|
7,3
|
2
|
Artas
|
8,8
|
Total de la surface confisquée
|
16,1**
|
**la surface mentionnée dans l’ordre est la surface de terres nécessaires à la construction de la section du Mur restante
|
The Applied Research Institute – Jerusalem, 2012
|
La publication de l’extension de validité de l’ordre contredit les dires de la Radio de l’Armée Israélienne selon lesquels le Ministère Israélien de la Défense avait gelé la construction du Mur à côté de la colonie de Gush Etzion en raison des restrictions budgétaires. Le Ministère israélien du Logement et de la Construction avait cependant ajouté que l’édification du Mur reprendrait dans cette zone fin 2012. Toujours selon la radio de l’armée, le coût de la construction du mur à Gush Etzion serait d’environ 5 milliards de shekels.
L’annexion de la zone rurale de l’Ouest du gouvernorat de Bethleem
Le tracé du Mur de Ségrégation prévoit qu’il suive la route de contournement n°60 pour continuer vers le Sud, jusqu’à la partie Ouest de Khalayel Al-Louz ce qui isolera complètement la zone rurale de l’Ouest du gouvernorat de Bethleem, qui inclut huit communautés palestiniennes
. Ces communautés deviendront inaccessibles pour les palestiniens n’y résidants pas. De plus, le Mur annexera les 11 colonies israéliennes que constituent le bloc de colonies de Gush Etzion comme faisant désormais partie du ‘Grand Jérusalem’. Le Grand Jérusalem est un projet amorcé à la fin des années 1970 lorsque le gouvernement a étendu la zone de construction des colonies en-dehors des frontières israéliennes de Jérusalem (la ville étant séparé en deux, partie israélienne à l’Ouest et palestinienne à l’Est) afin de créer une continuité de colonies autour de la ville Sainte et de couper Jérusalem-Est de la Cisjordanie. Cette démarche a pour but d’augmenter la population juive autour de Jérusalem et d’imposer une suprématie démographique juive qui permettrait de renforcer l’emprise sur la ville. Les colonies construites se sont concentrées autour de blocs principaux : Giv’at Ze’ev au Nord, Ma’ale Adumin à l’Est et Gush Etzion au Sud-ouest ainsi que d’un quatrième construit plus tard, le bloc de colonies Binyamin.
Conclusion
La construction du Mur de Ségrégation résulte d’une violation des Droits de l’Homme tels que le droit à la liberté de mouvement
, le droit de travailler
, le droit à la santé
, à l’éducation
et le droit d’avoir des conditions de vie satisfaisantes. La Cour Internationale de Justice consacre le droit à l’autodétermination
du peuple palestinien, qui lui est toutefois refusé par la rupture de l’intégrité territoriale et de l’unité de la population. «Légitime défense» ou «nécessité d’Etat» ne peuvent pas être utilisées comme justifications pour violer ces droits et autres principes juridiques internationaux. Israël doit donc cesser l’édification du Mur de Ségrégation et tous les autres États doivent s’abstenir de soutenir Israël dans son projet.
En outre, la création de la Zone de Ségrégation Occidentale vient en violation de tous les traités de paix signés entre les palestiniens et les israéliens et est un manquement à l’Accord Intérimaire d’Oslo de 1995 qui stipule que, « les deux parties s’engagent à ne prendre aucune mesure qui changerait le statut de la Cisjordanie et la bande de Gaza en attendant le résultat des négociations sur le statut permanent ». (Accords d’Oslo II, article 31, paragraphe 7).
Un avis consultatif de la CIJ a fortement réprimandé les actions israéliennes telle que la création du mur de sécurité, et a exposé les fausses allégations d’Israël considérant le mur de sécurité comme la seule option pour la défense du pays. L’avis consultatif a déclaré que la force occupante (Israël) a pris des mesures illégales contre le peuple palestinien, sa terre, et ses moyens de subsistance.
La Cour a donné cinq réponses à la question posée par l’Assemblée générale dans sa résolution ES-10/14. L’avis est cité ci-dessous
1. « Par quatorze voix contre une. L’édification du mur qu’Israël, puissance occupante, est en train de construire dans le territoire palestinien occupé, y compris à l’intérieur et sur le pourtour de Jérusalem-Est, et le régime qui lui est associé, sont contraires au droit international ; »
2. « Par quatorze voix contre une. Israël est dans l’obligation de mettre un terme aux violations du droit international dont il est l’auteur; il est tenu de cesser immédiatement les travaux d’édification du mur qu’il est en train de construire dans le territoire palestinien occupé, y compris à l’intérieur et sur le pourtour de Jérusalem-Est, de démanteler immédiatement l’ouvrage situé dans ce territoire et d’abroger immédiatement ou de priver immédiatement d’effet l’ensemble des actes législatifs et réglementaires qui s’y rapportent, conformément au paragraphe 151 du présent avis ; »
3. Par quatorze voix contre une. Israël est dans l’obligation de réparer tous les dommages causés par la construction du mur dans le territoire palestinien occupé, y compris à l’intérieur et sur le pourtour de Jérusalem-Est; »
4. Par treize voix contre deux. Tous les Etats sont dans l’obligation de ne pas reconnaître la situation illicite découlant de la construction du mur et de ne pas prêter aide ou assistance au maintien de la situation créée par cette construction; tous les Etats parties à la quatrième convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre, du 12 août 1949, ont en outre l’obligation, dans le respect de la Charte des Nations Unies et du droit international, de faire respecter par Israël le droit international humanitaire incorporé dans cette convention; »
5. Par quatorze voix contre une. L’Organisation des Nations Unies, et spécialement l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité, doivent, en tenant dûment compte du présent avis consultatif, examiner quelles nouvelles mesures doivent être prises afin de mettre un terme à la situation illicite découlant de la construction du mur et du régime qui lui est associé. »
[1] Les communautés concernées sont : Battier, Hussan, Nahalin, Wadi Fukin, Al Jab’a, Khallet ‘Afaneh (‘Afaneh Hamlet), Khallet Beit Zakariyya (Beit Zakariyya Hamlet) et Khallet Al-Balluta (Al-Balluta Hamlet), pour un total de plus de 23 000 palestiniens
[2] Article 13 de la Déclaration des Droits de l’Homme
[3] Article 23 de la Déclaration des Droits de l’Homme
[4] Article 25 de la Déclaration des Droits de l’Homme
[5] Article 26 de la Déclaration des Droits de l’Homme
[6] Cour Internationale de Justice, ‘Conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé (Requête pour avis consultatif), 9 juillet 2004’.
[7] Cour Internationale de Justice, ‘Conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé (Requête pour avis consultatif), 9 juillet 2004’.
Prepared by: