1- Giva’ot, une base militaire transformée en colonie illégale
Le journal israélien Ma’ariv a révélé le 11 février 2012 que le Ministre de la Défense israélien Ehud Barak avait approuvé un plan pour construire une nouvelle colonie à la place de la base militaire de Giva’ot, à côté du bloc de colonies de Gush Etzion, dans l’Ouest du gouvernorat de Bethléem. La première partie du plan, qui inclut la construction de 60 logements, a été approuvé par le Ministre.
Selon le quotidien, la décision d’Ehud Barak est venue en réponse à la demande du président par intérim du bloc de colonie de Gush Etzion, Ya’ier Wolf, de changer le statut de la base militaire afin d’être utilisée pour une nouvelle colonie, spéciale pour les colons avec « des besoins spéciaux ».
Le journal ajoute que « le but est de construire une route adjacente reliant le bloc de colonies de Gush Etzion à la ville de Beit Shemesh et aux autres communes israéliennes à l’intérieur de la Ligne verte », de manière à créer une continuité géographique entre les colonies israéliennes de Cisjordanie et celles de la Ligne Verte, et dans le même temps déconnectant les communes palestiniennes les unes des autres.
La base militaire de Giva’ot
Etablie en 1982 pour l’armée israélienne, la base a été remplacée au début des années 1990 par des étudiants des Yeshivah (écoles religieuses) occupants 30 caravanes sur le site. Le 1er juillet 1998, un ordre publié par le commandement régional israélien pour la Cisjordanie a déclaré que la modification de la juridiction de la colonie illégale d’Alon Shuvut (une du bloc de colonies de Gush Etzion) inclurait la base militaire de Giva’ot. Le 23 mars 2011, le journal israélien Haaretz a publié le plan israélien pour construire 2000 logements, qui fait partie d’un projet plus vaste de construire 6000 logements dans ce qui sera la colonie religieuse de Giva’ot.
Vidéo de la base militaire de Giva’ot
2- ‘Migron’ : d’un avant-poste illégal à une colonie illégale
‘Migron’ : l’avant-poste
L’histoire de l’avant-poste illégal de Migron a début le 20 avril 1999 lorsque deux jeunes colons ont mis en place un conteneur au sommet de la colline adjacente des villages de Deir Dibwan et Burka, à l’Est du gouvernorat de Ramallah. L’avant-poste est situé à environ 7km à l’Est de Ramallah et à 2,5km de la colonie illégale de Kockav Yaakov.
Une succursale de la compagnie de téléphone Orange a été installée sur le site de Migron en 2001. L’entreprise a embauché un gardien pour assurer la sécurité et protéger l’antenne. Celui-ci a relié sa cabane à l’eau et à l’électricité, a déménagé avec sa femme pour vivre dans la région. Puis, en mars 2002, cinq familles juives ont rejoint le gardien de la sécurité, ce qui a contribué à l’émergence de l’avant-poste.
Image satellite de l’avant-poste de Migron
Aujourd’hui, après le soutien des autorités d’occupation israéliennes, des institutions publiques et des bureaux ont été installés dans l’avant-poste, notamment une clinique, une branche de la « Benyamin Council Library », trois crèches, un centre de jeu et une synagogue.
Chronologie des faits
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En 2006, le mouvement « Peace Now » (Paix Maintenant) ainsi que six résidents palestiniens déposent une pétition devant la Haute Court de Justice Israélienne, demandant l’éviction des colonies israéliennes de ce site, puisque 10 hectares de terres sur lesquels est installé l’avant-poste leur appartiennent (8 hectares au village de Deir Dibwan et 2 hectares au village de Burka).
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Décembre 2006 : la Haute Court de Justice Israélienne répond à la pétition et demande le démantèlement de l’avant-poste de Migron car il a été créé sur des « terres privées palestiniennes », et les colons n’ont pas eu l’autorisation pour construire cet avant-poste. Le Ministère de la Défense avait 60 jours pour évacuer les colons.
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Mai 2007 : le Premier Ministre de l’époque, Ehud Olmert, affirme à la Cour Suprême son intention d’évacuer l’avant-poste mais demande deux mois supplémentaires pour préparer le démantèlement en coordination avec le Ministère de la Défense.
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Juillet 2007 : Ehud Olmert demande à nouveau un délai de trois mois pour discuter de cet avant-poste avec le nouveau ministre de la Défense Ehud Barak.
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Janvier 2008 : Olmert informe la Cour Suprême que le gouvernement a l’intention de démanteler l’avant-poste dans les six mois.
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Aout 2008 : le Comité de Suivi de l’Etat de la Knesset indique que le gouvernement va évacuer et démanteler quatre avant-postes, et Migron sera le premier. Le même mois, une barrière électronique est installée aux portes de l’avant-poste, financée par le « Conseil Régional des Colonies Benjamin », en dépit de l’interdiction du gouvernement israélien de lever des fonds pour les avant-postes illégaux.
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Le gouvernement décide également d’étendre la colonie illégale d’Adam pour absorber les colons de Migron, évacués de l’avant-poste. Le plan d’expansion prévoit la construction de 1450 logements.
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Octobre 2008 : les propriétaires palestiniens des terres occupées par les colons de Migron soumettent à la Cour Suprême un appel pour obtenir 1,5 million de Shekels comme compensations, ainsi que le droit de récupérer leurs terres.
Selon le rapport ‘Sasson’ (rapport officiel rédigé par le gouvernement israélien et par la présidente du département des Poursuites Pénales contre l’Etat, Talia Sasson, publié le 8 mars 2005), l’avant-poste de Migron fait partie des 95 avant-postes classés comme « illégaux » (selon les textes israéliens) qui doivent être démantelés. De plus, le rapport révèle que le Ministère Israélien du Logement et de la Construction a dépense 4,5 millions de Shekels pour construire et soutenir les avant-postes.
Netanyahou outrepasse la décision de la Cour Suprême
L’avant-poste de Migron a toujours été une question controversée pour les gouvernements israéliens. Bien qu’ils considéraient l’avant-poste comme illégal et qu’il devait être démantelé, ils n’ont jamais pris aucune décision pour résoudre le problème. Au contraire, ils l’ont soutenu, directement et indirectement. Directement car ils ont financé son installation et l’ont aidé en soutenant l’implantation d’infrastructures visant à faciliter la vie des colons. Indirectement car ils ne l’ont pas expulsé après la décision de la Cour Suprême.
Le 2 aout 2011, la Cour Suprême israélienne a à nouveau publié une décision finale appelant le gouvernement Netanyahou à démanteler Migron dans les six mois, soit avant mars 2012.
Le Premier Ministre, en accord avec une longue histoire de manipulations, a réalisé qu’il devait apporter une solution au problème de Migron, mais bien sur dans l’intérêt des colons israéliens. Sa décision est conforme à son comportement colonial qui apporte un soutien inconditionnel à toutes les colonies et à tous les avant-postes des Territoires Palestiniens Occupés (TPO). Il a donc décidé de passer un « compromis » avec les colons de Migron dans lequel l’avant-poste deviendrait légal après deux ans (bien qu’il soit illégal selon le gouvernement israélien) !
Le quotidien israélien Ma’ariv révèle le 23 février 2012 que le Premier Ministre a réussi, après de longues négociations, à atteindre un accord avec les colons de Migron. Ceux-ci pourront rester dans leurs maisons dans l’avant-poste dans les deux années à venir. Après cette période, le gouvernement israélien construira une nouvelle colonie pour eux à 3km de l’emplacement actuel. Selon le journal, la Cour Suprême va ratifier l’accord qui débouchera sur la construction d’une nouvelle colonie en échange de l’avant-poste de Migron.
Bien entendu, cet accord entre Netanyahou et les colons a été félicité par les membres de l’extrême-droite israélienne de la Knesset. Le président du lobby ‘Terre d’Israël’ Ze’ev Elkin (Likoud) et Arieh Eldad (parti d’Union Nationale) ont accueilli positivement l’accord : « c’est une victoire pour le Sionisme et pour la colonisation juive qui va au-delà des tentatives de la gauche pour saboter les colonies en terre d’Israël. »
Statut légal et international
La tentative de Netanyahou de légitimer les colonies et avant-postes israéliens dans les TPO est une manipulation délibérée pour tromper la communauté internationale en suggérant qu’il y a des colonies et avant-postes légaux, et d’autres illégaux. En réalité, toutes les colonies et avant-postes israéliens construits après l’occupation militaire israélienne des territoires palestiniens le 4 juin 1967 sont illégaux et nuls. Le Premier Ministre israélien doit se conformer aux règles du Droit International ainsi qu’aux décisions légitimes de la communauté internationale, représentée par le Conseil de Sécurité des Nations Unies, qui demandent le démantèlement des avant-postes au lieu de leur expansion.
L’existence et l’expansion de colonies israéliennes en territoires palestiniens, y compris Jérusalem-Est est illégale et va à l’encontre du Droit International, et notamment des résolutions 237 (1967), 271 (1969), 446 (1979), 452 (1979) ou encore 465 (1980) du Conseil de Sécurité de l’ONU.
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La résolution 452 du CSNU publiée le 20 juillet 1979 « demande au gouvernement et au peuple israélien de cesser d’urgence d’établir, édifier et planifier des colonies de peuplement dans les territoires arabes occupés depuis 1967, y compris Jérusalem » ;
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l’article 49, paragraphe 1 de la IV Convention de Genève certifie que « les transferts forcés, en masse ou individuels, ainsi que les déportations de personnes protégées hors du territoire occupé dans le territoire de la Puissance occupante ou dans celui de tout autre Etat, occupé ou non, sont interdits, quel qu’en soit le motif » ;
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l’article 31, paragraphe 7 des Accords d’Oslo II de 1995 stipule que « les deux parties s’engagent à ne prendre aucune mesure qui changerait le statut de la Cisjordanie et la bande de Gaza en attendant le résultat des négociations sur le statut permanent » ;
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la Feuille de Route vers la Paix signée le 30 avril 2003 entre Israël et les palestiniens (développée par les Etats-Unis en coopération avec la Russie, l’Union Européenne, le Quartette) stipulait que le gouvernement d’Israël acceptait de geler les colonies : « le gouvernement israélien démantèle immédiatement les colonies avancées établies depuis mars 2001. Conformément au rapport Mitchell, le Gouvernement israélien bloque toutes les activités d’implantation de colonies (y compris l’expansion naturelle des colonies).»
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en mai 2001, le président de la délégation du Croissant Rouge pour Israël et les Territoires Occupés a dit que « les colonies sont égales en principes à des crimes de guerre » (conférence de presse, 17 mai 2001).
Prepared by
The Applied Research Institute – Jerusalem
ARIJ