Des barrières à la paix: le 7ème anniversaire de l’avis consultatif de la cour internationale de justice sur les conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé

Des barrières à la paix: le 7ème anniversaire de l’avis consultatif  de la cour internationale de justice sur les conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé
Photographie du mur prise au Camp Aida, Bethléem
Source: photo prise par Ashley C. Overholser, ARIJ
 
 
Cour internationale de justice
Le samedi 9 juillet 2011 marque le septième anniversaire de l’avis consultatif de la cour internationale de justice sur les conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé .La cour internationale de justice (CIJ), l’organe juridique principal des Nations Unies, situé au palais de la paix à la Haye, aux Pays-Bas, a été établie en 1945 par la charte de l’ONU. Le rôle de la cour consiste à régler, en accord avec le droit international, les litiges soumis par les Etats et de rendre des avis consultatifs sur des questions juridiques qui lui sont déférées par les organes autorisés des Nations Unies ou des agences spécialisées. 
L’assemblée générale des Nations Unies a instamment et officiellement requis, en décembre 2003, par le biais de la résolution ES-10/14, que la Cour internationale de justice fournisse un avis consultatif fondé sur la question suivante :
«Quelles sont en droit les conséquences de l’édification du mur qu’Israël, puissance occupante, est en train de construire dans le territoire palestinien occupé, y compris à l’intérieur et sur le pourtour de Jérusalem-Est, selon ce qui est exposé dans le rapport du Secrétaire général, compte tenu des règles et des principes du droit  international, notamment la quatrième  convention de Genève de 1949 et les  résolutions consacrées à la question par le Conseil de sécurité et l’Assemblée  générale ?»
 
Un appel à l’action
Le 9 juillet 2004, la Cour Internationale de Justice, un  des organes juridiques de référence  les plus respectés, a établi que la construction du mur constituait une violation du droit international ; afin d’indiquer les conséquences légales de l’édification du mur, la cour a tout d’abord du établir si ce mur constituait oui ou non une violation du droit international. 
La cour en a déduit quelles règles et principes de droit international étaient applicables, en jugeant la légalité des mesures prises par le gouvernement israélien, mais, plus encore, en examinant les conséquences des violations par Israël de ses obligations internationales, en distinguant, d’une part, les obligations qui en résultent pour Israël, et, d’autre part, celles qui en résultent pour les autres Etats, y compris, le cas échéant, pour les Nations Unies.  
Finalement, la cour a conclu que les Nations Unies, et plus particulièrement l’assemblée générale et le conseil de sécurité, devraient examiner quelles actions supplémentaires sont requises  afin de mettre fin à la situation illégale résultant de l’édification du mur et du régime qui y est associé, en prenant bien en considération les recommandations émises au sein du présent avis consultatif. 
Par la suite, des recommandations ont été émises au sein de l’avis consultatif, espérant ordonner à Israël l’arrêt de l’édification du mur, le démantèlement des sections déjà construites, le paiement de réparations pour tous les dégâts causés par la construction du mur et finalement la cessation de  l’ensemble des actions illégales de l’occupation, comme la démolition de maisons, la confiscation de terres et la restriction des mouvements au sein de la Cisjordanie et de Jérusalem-Est.
 
 De plus, la cour a mis l’accent sur le fait que le mur constitue un obstacle physique modifiant non seulement la composition démographique du territoire palestinien occupé, mais violant également le droit du peuple palestinien à l’autodétermination. La reconnaissance de la communauté internationale est un succès énorme, d’autant plus que l’avis consultatif n’a pas été requis par une entité arabe ou palestinienne, mais bien par un consensus général de la communauté internationale, représenté par l’assemblée générale des Nations Unies.
 
L’année dernière, ce dossier contenait non seulement une section sur le contexte et les conclusions légales de l’avis consultatif de la CIJ de 2004, mais aussi une section soulignant les faits établis sur le terrain violant le droit international et continuant à défier les conclusions de la CIJ en 2004. En effet, ces faits établis ont témoigné clairement de la manière dont le gouvernement israélien continue et renforce ses enfreintes aux droits du peuple palestinien, par la poursuite de la construction du mur de ségrégation.
 
Vous n’êtes pas sans savoir que l’avis consultatif fut établi afin de demander, à Israël de « cesser immédiatement les travaux d’édification du mur » et de « réparer les dommages causés », à la communauté internationale de « reconnaître la situation illégale résultant de l’édification du mur », et enfin à l’assemblée générale et au conseil de sécurité des Nations Unies d’« examiner quelles nouvelles mesures doivent être prises afin de mettre un terme à la situation illicite découlant de la construction du mur et du régime qui lui est associé. » Quant à l’année dernière, la décision de la CIJ a été consciemment et continuellement ignoré par le gouvernement israélien et la communauté internationale, alors même que l’avis consultatif est clair dans sa dénonciation du mur de ségrégation ainsi que dans sa demande faite à Israël de démanteler le mur de ségrégation et de cesser toutes ses activités d’occupation illégales.
 
Cependant, ces sept dernières années, de nombreux nouveaux développements et de nouvelles tentatives du peuple palestinien d’entreprendre des actions plus poussées concernant la construction du mur ont eu lieu, notamment le démantèlement récent du mur dans la ville palestinienne de Bil’in. Le 21 juin 2011, quatre ans après la décision de la soi-disant « cour suprême israélienne » de démanteler la section du mur de ségrégation jugée illégale par la décision de la cour du 4 septembre 2007,  à Bilin, un village à l’ouest de Ramallah, l’armée israélienne a commencé à démanteler la barrière électrique de deux kilomètres dans les parties occidentales du village. En conséquence, le village va regagner 1200 dunums sur les 1968 isolés derrière le mur,  sur une superficie totale pour le village de 4040 dunums. Le nouveau tracé défini pour remplacer la clôture existante s’étend sur 3,2 kilomètres, alors que l’armée israélienne est supposée terminer le démantèlement de la clôture à la mi-juillet 2011.
 
Premier Juillet 2011 – des Palestiniens célèbrent le déplacement, la semaine précédente,  d’une portion du mur de ségrégation de Cisjordanie dans le village de Bilin, près de Ramallah. Les habitants ont commencé vendredi à construire des bâtiments sur les terres nouvelles accessibles.
Source : photo prise par Oren Ziv / Activestills.org
 
Le village de Bil’in faisait partie de ces villages palestiniens en Cisjordanie qui avaient perdu d’immenses portions de leurs terres pour la construction du mur de ségrégation et d’apartheid ; le 15 avril 2004, l’armée israélienne avait émis l’ordre militaire n° 40/04/T, ordonnant la confiscation de 384 dunums de terres  de Bil’in et du village adjacent de Safa pour des raisons militaires, principalement la construction du mur de ségrégation. L’édification du mur de Ségrégation à Bil’in a commencé le 7 mars 2005, en se concentrant dans les parties occidentales du village. Selon l’étude conduite par le département GIS (geographical information system – système d’information géographique) d’ARIJ sur le tracé modifié du mur de ségrégation d’avril 2007, publié sur le site du ministère israélien de la Défense, le village de Bil’in avait perdu 1968 dunums de terres, isolées derrière le tracé du mur de ségrégation qui s’étend sur deux kilomètres à travers le village, le divisant en deux et le séparant de ses terres agricoles, situées dans les parties occidentales du village.
 
Il est intéressant de mentionner que le 4 septembre 2007, la cour israélienne avait émis l’ordre de changer l’itinéraire d’1,7 km du mur de ségrégation à Bil’in, le déplaçant à 500 mètres de la zone urbanisé du village ; la décision de la court était le résultat d’une vague de pétitions signées par les habitants de Bil’in et son conseil municipal, exigeant de reconstruire le mur sur la ligne vert ou plus à l’ouest, en plus des objections des Palestiniens sur les conditions de vie misérables provoquées par la construction du mur sur leurs  terres.
 
Malgré tout, le démantèlement du mur à Bil’in atteste du pouvoir de la résistance non-violente et constitue une étape positive vers la paix. La volonté du peuple palestinien demeure forte, les droits du peuple palestinien doivent être respectés, et le gouvernement israélien doit commencer à aborder la question de la légalité de la construction et du démantèlement du mur dans le territoire palestinien occupé. Les Palestiniens attendent de l’ONU qu’elle fasses respecter ses responsabilités, définies par la charte des Nations Unies, de « préserver les nations futures du fléau de la guerre » et de « proclamer à nouveau notre foi dans les droits fondamentaux de l’homme, dans la dignité et la valeur de la personne humaine, dans l’égalité de droits des hommes et des femmes, ainsi que des nations, grandes et petites ». 
 
Au sujet du mur de ségrégation israélien
Une fois terminé, le mur de ségrégation israélien s’étendra sur 774 km en Cisjordanie ; 6,5% du mur, soit 51 km seulement, suivront la ligne d’armistice de 1949. Le tableau suivant montre le statut du mur de ségrégation en Cisjordanie en juin 2011 :
Statut
Longueur/ Km
Pourcentage
Existant
473
61
En construction
54
7
Prévu
247
32
Total
774
100%
51 km (6.5% de la longueur totale du mur) suit la ligne d’armistice de 1949 (la ligne verte)
 
Le mur annexera, dans la zone comprise entre le mur et la ligne d’armistice de 1949, alias la zone de ségrégation occidentale, 107 colonies israéliennes, accueillant plus de 80% de la population des colons israéliens en Cisjordanie (plus de 582 000 colons israéliens) ainsi que 66 localités palestiniennes de Cisjordanie, y compris 30 à Jérusalem. De plus, le mur de ségrégation isolera, au sein de la zone de ségrégation occidentale, 733 km² (733 000 dunum, 73 300 hectares), soit 13% de la superficie totale de la Cisjordanie. Le tableau suivant montre la classification des terres palestiniennes isolées au sein de la zone de ségrégation occidentale
 
Zone de ségrégation occidentale (733 km2) Terre utilisée/ Terre couverte
Elément
Superficie/ km2
Pourcentage
Terres agricoles
348
47.5
Colonies israéliennes et bases militaires
110
15
Forêts et espaces ouverts
250
34
Zones urbanisées palestiniennes
25
3.5
Total
733 km2
100%
 
L’effet des projets israéliens (l’isolation de la zone de ségrégation occidentale), auront des conséquences sévères sur la vie de milliers de Palestiniens dont les vies seront assujetties au contrôle de l’armée israélienne, en plus de la séparation évidente d’avec leur environnement naturel  dans les territoires palestiniens occupés. Au total, 66 localités palestiniennes (320 601 habitants), dont 30 à Jérusalem (274 481 habitants), seront isolées de la Cisjordanie par le mur israélien lorsque sa construction sera achevée
 
Pour le septième anniversaire de l’avis consultatif, ARIJ demande à la communauté internationale de faire pression sur Israël pour arrêter la construction du mur de ségrégation, mais loue également les tentatives comme celles de Bil’in de faire respecter leurs droits. En outre, ARIJ demande à la communauté internationale de prêcher pour le retrait total du mur des territoires palestiniens occupés (TPO), puisque la poursuite de la construction du mur de ségrégation viole les droits de l’homme fondamentaux du peuple palestinien, y compris le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.
 
Les Palestiniens ont attendu sept ans depuis le rendu du verdict de la CIJ et soixante-trois ans depuis qu’ils ont été expulsés de leurs terres en 1948. Combien de futures conclusions, d’avis, ou de déclarations faudra-t-il avant que justice ne soit faite ? Le démantèlement du mur à Bil’in est une barrière qui a été franchie – attaquons nous maintenant aux autres obstacles à la paix, à travers le pays, par le renforcement de la coopération avec la communauté internationale, en se conformant à l’avis consultatif de la cour internationale de justice et à ses décisions, avec l’espoir d’une amélioration. 
 

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1 International Court of Justice. “The Court.” http://www.icj- 
2 cij.org/court/index.php?p1=1&PHPSESSID=bc2556f8aaf4b64ba9a00d539f00d710
3 International Court of Justice. “Legal Consequences-Summary of Advisory Opinion of 9 July 2004.” http://www.icj-cij.org/docket/files/131/1677.pdf
3International Court of Justice. “The Court.” http://www.icj-cij.org/court/index.php?p1=1&PHPSESSID=bc2556f8aaf4b64ba9a00d539f00d710
4 International Court of Justice. “Legal Consequences-Summary of Advisory Opinion of 9 July 2004.” http://www.icj-cij.org/docket/files/131/1677.pdf
4International Court of Justice. “The Court.” http://www.icj-cij.org/court/index.php?p1=1&PHPSESSID=bc2556f8aaf4b64ba9a00d539f00d710
4 International Court of Justice. “Legal Consequences-Summary of Advisory Opinion of 9 July 2004.” http://www.icj-cij.org/docket/files/131/1677.pdf
5 Ibid. p. 7.
6 Ibid.
7 Ibid.
9 [9] United Nations Charter, Preamble, http://www.un.org
 
 
Reférences
  • International Court of Justice. “The Court.”
 
  • International Court of Justice. “Legal Consequences-Summary of Advisory Opinion of 9 July 2004.”
  • United Nations General Assembly. “Illegal Israeli actions in Occupied East Jerusalemand the rest of the Occupied Palestinian Territory.” 12 December 2003.
 
 
 

Prepared by:

The Applied Research Institute – Jerusalem
ARIJ

Categories: Reports