Le 15 mars 2012, les Forces d’Occupation Israélienne accompagnées de l’Administration Civile se sont rendues sur les terres agricoles du village de Beit Dajan, plus particulièrement dans la partie Est du village dans la région d’Al-Tyour.
Selon le président du Conseil Municipal Nasir Abu Jiesh, les forces israéliennes, composées de quatre véhicules de l’Administration Civile, neuf véhicules des Forces d’Occupation et un bulldozer, sont venues tôt dans la matinée du 13 mars afin d’arracher 450 plants d’oliviers sur les terres appartenant au paysan Jamual Muhammad Kina’an. Cette intervention a été justifiée par le prétexte que ces terres sont situées dans une zone militaire, proche d’un terrain d’essai d’artillerie de l’armée israélienne. Ci-après, les photos des terres concernées :
Mr Kina’an a cultivé ces terres depuis 12 ans, lesquelles ont déjà été attaquées quatre fois par les israélien : trois fois par les Forces d’Occupation Israéliennes et deux fois par les colons de l’avant-poste situé à côté de la colonie illégale d’Alon Moreh. Le tableau 1 ci-après montre les détails des précédentes attaques sur les terres de Jamal Muhammad Kina’an.
Tableau 1: Détails des attaques sur les terres agricoles de Mr Kina’an
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No.
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Responsables
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Superficie des zones concernées
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Arbres arrachés
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Date
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1.
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Colons israéliens
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25
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100
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Mars 2003
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2.
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Forces d’Occupation Israéliennes
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39
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800
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Février 2007
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3.
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Forces d’Occupation Israéliennes
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30
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500
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Mars 2010
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4.
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Colons israéliens
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10
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450
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Mars 2011
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5.
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Forces d’Occupation Israéliennes
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15
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450
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Mars 2012
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Source: Conseil Municipal de Beit Dajan Equipe de terrain d’ARIJ – 2012
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Il est important de préciser que le propriétaire dispose des documents officiels qui prouvent que les terres concernées lui appartiennent. Les documents 1 et 2 montrent les photocopies des titres de propriété. Ces terres disposent d’un titre particulier dans la mesure où elles sont classifiées comme « Finance Parcel » (classification remontant aux lois ottomanes), code N°2 et comme « Piece Land », Code N° 1422.
Les cartes 1 et 2 montrent les zones concernées par les mesures de l’armée israélienne
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Map 1: Emplacement des arbres– Al-Rqaqa |
Carte 2: Zones agricoles de Beit Dajan |
Si le prétexte invoqué est celui que les terres sont sur une zone militaire et sur un terrain d’essai pour l’artillerie de l’armée, celui-ci se situé à plus de 1,5km et n’a surtout plus été utilisé depuis plus de 20 ans, à la fin de la Guerre du Golfe. Les terres ciblées sont situées dans une zone qui a été confisquée en 1987 sous le prétexte de l’usage militaire. Mais après une procédure judiciaire, toutes les terres ont été rendues à leurs propriétaires à l’exception de celles de Mr Kina’an qui ont été gardées, pour des raisons inconnues. Chaque fois que le Conseil Municipal ou que les avocats essayent d’obtenir la raison, la Court et l’Administration Civile dénient leur droit de savoir.
En juillet 2010, le propriétaire des terres a reçu l’ordre militaire N°430 qui ordonnait l’évacuation des terres dans les 45 jours suivant la réception de l’ordre, lequel est accompagné de cartes des terres concernées (voir ci-après).
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Ordre militaire N° 1
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Ordre militaire N°2
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Ordre militaire N°3
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Attaques précédentes
Le 18 mars 2011, les colons israéliens de la colonie illégale de Alon Moreh se sont rendus sur les terres de Mr Kina’an pour arracher eux-mêmes 450 plants d’oliviers, rasant près d’un hectare de terre.
Le 8 juillet 2010, les Forces d’Occupation Israéliennes se sont rendues à Al-Rqaqa dans la région d’Al-Tyour (partie Est du village) pour raser plus de trois hectares et pour arracher 500 oliviers, sous le prétexte que ces terres se situent en zone militaire fermée et proche d’un terrain d’essai de l’armée.
Le 13 février 2007, l’armée s’est rendue sur les terres agricoles de l’Est du village de Beit Dajan où elle a rasé environ quatre hectares de terre et arraché 800 oliviers. Dans ces trois derniers cas, les arbres arrachés ont été confisqués par les forces d’occupation.
Le 7 mars 2003, les colons de Mekhora ont attaqué ces mêmes terres en rasant plus de deux hectares de terres et en arrachant 100 oliviers. Cette fois-ci, les colons ont ensuite brulé les arbres arrachés.
Situation géopolitique du village
Beit Dajan est situé à 10km à l’Est du centre de Naplouse, dans le Nord de la Cisjordanie. Le village est bordé au Sud par Yanun et Ar-Rajman, au Sud-est par Beit Furik et la colonie israélienne d’Itamar (ainsi que ses 4 avant-postes). Au Sud-ouest, le village est entouré par Shihda Wa Hamlan, au Nord-ouest par Furush Beit Dajan, à l’Ouest par le camp de réfugié de Balata et enfin à l’Est par la colonie d’Hamra.
Selon le Bureau Central Palestinien pour les Statistiques, le village compte 3868 habitants sur une superficie totale de 4400 hectares, donc 36 représentent la zone bâtie.
Selon les Accords intérimaires israélo-palestinien de 1995, les terres du village sont classifiées entre les zones B et C. 993 hectares sont classés en zone B alors que 3400 sont en zone C. La zone B est sous contrôle palestinien pour les questions sociales, économiques et civiles, et sous contrôle israélien pour les questions sécuritaires, militaires et administratives. La zone C quant à elle est sous complet contrôle israélien, notamment pour les questions, administratives, économiques, sociales et de sécurité.
Le village est en outre divisé entre deux gouvernorats, celui de Jéricho (1577 hectares) et de Naplouse (2522 hectares). De plus, le village a une grande partie de ses terres qui sont classifiées comme « zone militaire fermée » et 3400 hectares sont situés dans la Zone de Ségrégation Orientale. Enfin, le village a perdu plus de 180 hectares de terres dû à l’établissement des colonies dans la région. La colonie de Mekhorat a entrainé la perte de 27 hectares, la colonie de Hamra plus de 153 hectares.
Conclusion
La politique israélienne de démolition de maisons viole deux articles de la Quatrième Convention de Genève qui rend clairement la destruction de propriétés sans que cela soit rendu nécessaire pour la sécurité du pays illégale au regard du Droit International. La Convention interdit également toute forme de punitions collectives.
Le contrôle des terres palestiniennes est légalement justifié par des ordres militaires publiés par l’armée israélienne pour démolir et confisquer des terres pour des raisons de « sécurité ». Cependant, ces raisons de « sécurité » maquillent en réalité des raisons stratégiques, politiques et économiques, comme l’atteste le développement des colonies. Les pratiques israéliennes ne sont pas conformes aux Droit International qui énonce des instructions claires sur le comportement des puissances occupantes – ce qu’est Israël – sur une population occupée. Cependant, l’Etat juif continue de violer ces lois.
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Le paragraphe 6 de l’article 49 de la Quatrième Convention de Genève affirme que «la Puissance occupante ne pourra procéder à la déportation ou au transfert d’une partie de sa propre population civile dans le territoire occupé par elle ».
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L’article 53 de cette même Convention rappelle qu’il est « interdit à la Puissance occupante de détruire des biens mobiliers ou immobiliers, appartenant individuellement ou collectivement à des personnes privées, à l’Etat ou à des collectivités publiques, à des organisations sociales ou coopératives, sauf dans les cas où ces destructions seraient rendues absolument nécessaires par les opérations militaires ».
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Selon l’article 23 de la Convention de La Haye de 1907 à laquelle Israël est signataire depuis 1962, il est « interdit de détruire ou de saisir des propriétés ennemies, sauf les cas où ces destructions ou ces saisies seraient impérieusement commandées par les nécessités de la guerre ».
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De plus, l’existence des colonies israéliennes en Cisjordanie et leurs expansions sont illégale et en contradiction avec le Droit International, comme le rappelle continuellement l’ONU, par ses différentes résolutions : 237 (1967), 271 (1969), 446 (1979), 452 (1979), 465 (1980).
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Enfin, Israël ne respecte pas non plus les accords de paix que le pays a signé avec l’OLP en 1995, tel que l’article 31 des accords intérimaires, qui interdit Israël de construire des colonies ou de prendre quelque mesure qui changerait le statut de la Cisjordanie et de la Bande de Gaza.
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