Vague de démolitions israéliennes sur des structures palestiniennes à Anata, Nord-est de Jérusalem

Vague de démolitions israéliennes sur des structures palestiniennes à Anata, Nord-est de Jérusalem
Au petit matin du 24 janvier 2012, les bulldozers de l’armée israélienne accompagné par l’Armée d’Occupation Israélienne (AOI) ont envahi le quartier de Wa’r Al-Beik à Anata, ville palestinienne située au Nord-est de Jérusalem. Sans aucune notification préalable, ils démolirent sept maisons appartenant à des familles de Bédouins palestiniens sous le prétexte qu’elles avaient été construites sans permis de construire (ces maisons se situaient en zone C, qui selon les Accords d’Oslo II de 1995 est sous complet contrôle israélien).
Les structures détruites appartenaient à :
  • Ahmad Mohammad Suleiman Jahalin (5 membres de la famille déplacés)
  • Mousa Mohammad Suleiman Jahalin (8 membres de la famille déplacés)
  • Youseph Mohammad Suleiman Jahalin (7 membres de la famille déplacés)
  • Jibril Mohammed Suleiman Jahalin (2 membres de la famille déplacés)
  • Omar Mohammad Suleiman Jahalin (5 membres de la famille déplacés)
  • Jamiela Mohammad Suleiman Jahalin (5 membres de la famille déplacés)
  • Slim Shawamreh (7 membres de la famille déplacés)
Dans une interview accordée à l’équipe de terrain d’ARIJ, les propriétaires ont affirmé qu’ils vivaient dans le quartier de  Wa’r Al-Beik depuis 1992 et qu’ils ont reçu le premier ordre de démolition par l’AOI le 23 juillet 2011. Le second est arrivé trois mois plus tard, le 23 octobre. Dans la matinée du 24 janvier 2012, les engins israéliens ont détruit les constructions, ce qui se solda par le déplacement d’environ 40 personnes, dont une grande majorité d’enfants. Ci-après se trouvent les photocopies des ordres de démolition israéliens ainsi que la carte situant les sept maisons détruites:
 
 
 
 

Le même jour, les bulldozers se sont rendus dans le quartier d’Al-Fuheidat, situé à coté d’une base militaire israélienne appelée « Anatot » dans l’Est de la ville. Ils détruisirent une maison de 100m² appartenant à Imad Omar Khalil Al-Lahalia et habitée par 20 membres de sa famille sous prétexte d’absence des autorisations nécessaires. Mr. Al-Lahalia a indiqué qu’il avait reçu un ordre de démolition pour sa maison le 18 janvier 2012, date à partir de laquelle il avait trois jours pour quitter son logement. Il ajouta que c’était la deuxième fois que l’armée israélienne démolit sa maison, la première, de 180m² ayant été détruite en 1996 sous le même prétexte. (Photos 1 à 4).
 
 
   
Anata : le lieu et ses habitants
 
Anata est une ville palestinienne située au Nord-est de Jérusalem et qui s’étend sur un peu plus de 3000 hectares, dont 188 (6% de sa surface) constituent la partie constructible par les palestiniens. La ville se situe à 4km à l’Est de la Ligne Verte (Ligne d’Armistice de 1949) et à 5km de Jérusalem. Elle est bordée au Nord par le village d’Hizma ainsi que la colonie israélienne de “Allon”, au Sud par le village d’Az-Z’aeim, au Sud-ouest par la colonie de « Ramat Eshkol » et enfin à l’Est par Shu’fat.
 
Les divisions géopolitiques au sein d’Anata
 
Selon les Accords Intérimaires de 1995 appelés Accords d’Oslo II, signés entre Israël et l’OLP (Organisation de Libération de la Palestine) le 24 septembre 1995, les Territoires Palestiniens étaient divisés en trois zones (A, B, C) désignant le degré de contrôle. Cette classification a dispersé le territoire palestinien occupé et l’a transformé en cantons isolés, physiquement déconnectés les uns des autres. Ainsi, Anata a été divisé entre deux zones, la zone B et la zone C. Le tableau 1 donne les détails de la classification des territoires en général ainsi que plus spécifiquement à Anata.
 
Tableau 1 : Les divisions géopolitiques d’Anata selon les Accords d’Oslo II.
PARTIE I
Définition des zones selon Oslo II
Zone A
L’Autorité Palestinienne a une complète autonomie sur les questions administratives et de sécurité
Zone B
L’Autorité Palestinienne dispose uniquement des responsabilités civiles
Zone C
Israël dispose du complet contrôle de la zone, qui représente 61% de la Cisjordanie.
PARTIE II
Anata – en hectares
% du village
Zone A
0
0
Zone B
91,8
3
Zone C
2968,5
97
Total
3060,3
100
Sources : ARIJ database – 2012
 
L’occupation israélienne à Anata
 
Les plans de colonisation israéliens prévoyaient la confiscation de 152,5 hectares de terres à des fins sécuritaires pour construire des bases militaires. Israël a également saisi 262,8 hectares (8,5% du total de la ville) pour construire quatre colonies à l’intérieur des frontières de la ville (voir tableau 2).
Tableau 2 : Les colonies israéliennes illégales à l’intérieur des frontières d’Anata.
No.
Nom de la colonie
Date d’arrivée
Population
Surface dans la ville – en hectares
1.
Neve Brat
1992
600
87,1
2.
Kfar Adumim
1979
2127
75,1
3.
Almon (Anatot)
1983
762
69,5
4.
Allon
1990
520
31,1
TOTAL
****
4009
2628
 
Sources : ARIJ database – 2012
 
 
Le mur de Ségrégation à Anata
 
Selon le dernier tracé révisé du mur de Ségragation israélien publié par le Ministère israélien de la Défense en avril 2007, la ville d’Anata est piégée dans une enclave le long du camp de réfugiés de Shu’fat, où les deux communautés seront entourées de tous les côtés par le mur de Ségrégation, avec seulement un accès à Jérusalem par le terminal Shu’fat. Le mur, lorsqu’il sera achevé, coupera les deux communautés du centre de Jérusalem qui représente pourtant l’essentiel de l’activité de la région. La portion du mur qui encercle Anata et le camp de réfugié de Shu’fat s’étend sur 23km et va isoler 1855 hectares, soit 61% des 3060,3 hectares que représentent la ville. 
 
Conclusion
 
Les démolitions par l’AOI des maisons palestiniennes violent clairement la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, les Pactes Internationaux ainsi que les règles du Droit Humanitaire International. En effet,
  •  l’article 8 du Statut de Rome sur la Cour pénale internationale interdit « la destruction et l’appropriation de biens, non justifiées par des nécessités militaires et exécutées sur une grande échelle de façon illicite et arbitraire ». Ces actes, considérés comme crimes de guerre, sont une grave entorse aux Conventions de Genève ;
  •  l’article 23 de la Convention de La Haye de 1907 interdit « de détruire ou de saisir des propriétés ennemies, sauf les cas où ces destructions ou ces saisies seraient impérieusement commandées par les nécessités de la guerre » ;
  • la IVe Convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre signée le 12 août 1949 « interdit à la Puissance occupante de détruire des biens mobiliers ou immobiliers, appartenant individuellement ou collectivement à des personnes privées, à l’Etat ou à des collectivités publiques, à des organisations sociales ou coopératives, sauf dans les cas où ces destructions seraient rendues absolument nécessaires par les opérations militaires » ;
  •  l’article 3 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme proclame que « tout individu a droit à la vie, à la liberté et à la sûreté de sa personne » ;
  • enfin, l’article 25 de cette même Déclaration affirme que « toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l’alimentation, l’habillement, le logement, les soins médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires ; elle a droit à la sécurité en cas de chômage, de maladie, d’invalidité, de veuvage, de vieillesse ou dans les autres cas de perte de ses moyens de subsistance par suite de circonstances indépendantes de sa volonté ».
 

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1 La population d’Anata est de 13 101 habitants (Bureau Central Palestinien pour les Statistiques).
 
 
 
 
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